« La Commission européenne se focalise beaucoup sur l’économie. La culture n’est pas son domaine d’action privilégié. Jusqu’à présent, nous avons trop mis l’accent sur les aspects économiques et pas assez sur les aspects sociaux et notamment culturels. 0,015 % du budget de la Commission européenne est alloué à la culture. Ces choix budgétaires ne mettent pas en avant la culture », déclare Michel MagnierDirecteur de la culture et de la créativité @ Direction générale de l’éducation et de la culture de la Commission européenne • 1981 : diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris
• 1986 …
, à l’occasion du débat « L’Europe : alliée ou adversaire ? », organisé par News Tank Culture dans le cadre de Think Culture à l’Université Paris-Dauphine le 06/09/2016.
« Les chefs d’État dans leur pays, s’expriment toujours sur le rôle important de la culture, et en France particulièrement. Et, de manière paradoxale, l’Europe investit peu dans la culture. Il y a également un manque de financement évident de la part de l’UE
Union européenne
. C’est vrai qu’avec un budget de 0,015 %, on reconnaît le caractère totalement dérisoire de l’effort fait par l’Europe en matière de culture. Si l’on veut afficher une vraie politique culturelle européenne, il faut sans doute s’en donner les moyens », indique pour sa part François de MazièresCo-président de la commission Culture @ France urbaine • Président @ Versailles Grand Parc • Maire @ Mairie de Versailles .
« Il y a une contradiction fondamentale en Europe. Le fait d’avoir des réalités linguistiques et culturelles diverses amène les États membres à privilégier une politique régulatrice extrêmement forte, là où l’objectif de l’Europe est de briser les frontières et d’harmoniser. C’est pourquoi, nous avons l’impression que dès que l’UE s’occupe de quelque chose, c’est pour casser un certain nombre de protections », ajoute Hervé RonyPrésident @ Le FAIR • Directeur général @ Société civile des auteurs multimédia (La Scam) .
Cette rencontre, modérée par Eric BaptisteP-DG @ QwantumRights Solutions Corp. , réunissait Marie-Anne Ferry-FallPrésidente @ European Visual Artists (EVA) • Présidente @ Sorimage • Directrice générale @ Société des Auteurs Dans les Arts Graphiques et Plastiques (ADAGP) • Présidente @ AVA (Arts visuels…
, Michel Magnier, François de Mazières, Patrick RaudeSecrétaire général @ Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD) , Marcel RogemontPrésident (reconduit pour un 3e mandat le 12/12/2023) @ Fédération des Offices Publics de l’Habitat (FOPH) • Administrateur @ Néotoa • Né le 03/01/1948 à Coye-La-Forêt (Oise)
et Hervé Rony.
« Si l’Europe veut dire “harmonisation”, il y a un vrai risque, concernant le droit d’auteur, de nivellement par le bas » (Marie-Anne Ferry-Fall)
Très souvent, quand nos responsables politiques parlent du livre, ils évoquent le cinéma, la musique, mais oublient les arts graphiques et plastiques. C’est malheureux car nous sommes un secteur fondamental, notamment sur le plan économique avec un chiffre d’affaires de 21 milliards d’euros en France et plus de 300 000 d’emplois directs ou indirects liés à ce secteur.
Le droit d’auteur dans les arts visuels ne sous-tend aucune économie.
Dans le domaine du droit d’auteur, il faut avouer qu’en France, nous avons la meilleure protection qui puisse exister, si l’on compare avec d’autres pays du monde. Et, si l’Europe veut dire “harmonisation”, il y a un vrai risque, concernant le droit d’auteur, de nivellement par le bas.
Force est de constater que si les institutions européennes ont apporté pas mal de points positifs, nous avons plutôt souffert ces derniers temps.
En Europe, les différents présidents de la Commission ont fait des appels à la modernisation des droits d’auteur qui nous ont fait frémir.
Nous avions également cette impression que tous les responsables politiques étaient hypnotisés par les grands groupes de l’Internet notamment, en leur donnant une position extrêmement favorable, et en négligeant celle des artistes européens.
La France a un vrai rôle en Europe. Elle est l’aiguillon des autres pays qui attendent qu’elle propose des solutions toujours plus innovantes afin de protéger la culture. »
Marie-Anne Ferry-Fall, directrice générale de l'ADAGP
Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques
« Les choix budgétaires de la Commission ne mettent pas en avant la culture » (Michel Magnier)
Ces prises de position cachent une réalité beaucoup plus positive. L’Europe essaie de développer son action dans le domaine de la culture.
Beaucoup de gens, et notamment en France, ont cru que la Commission voulait tuer le droit d’auteur. À certains moments, nous disons des choses et nous avons cette impression que les gens nous entendent mal. Peut-être parce que nous ne sommes pas assez audibles.
La Commission européenne se focalise beaucoup sur l’économie. C’est le mandat qui lui est donné. La culture n’est pas son domaine d’action privilégié. Jusqu’à présent, nous avons trop mis l’accent sur les aspects économiques et pas assez sur les aspects sociaux et notamment culturels.
La compétence culturelle revient principalement aux États membres.
0,015 % du budget de la Commission européenne est alloué à la culture. Les choix budgétaires de la Commission ne mettent pas en avant la culture. Le budget du projet Europe Créative est de 200 millions d’euros.
Sur le plan politique, la culture ne figure pas expressément dans les priorités de la Commission. Il y a quand même un intérêt pour la culture, que l’on peut remarquer à travers certaines de ses priorités, notamment en ce qui concerne le marché unique numérique. Dans le cadre de ce projet, la culture est prise en compte. En ce sens, l’Europe est évidemment l’alliée de la culture.
La Commission européenne devrait pouvoir faire mieux et aller beaucoup plus loin que ce qui est fait aujourd’hui. »
Michel Magnier, directeur de la culture et de la créativité à la Direction générale de l’éducation et de la culture de la Commission européenne
« Si l’on veut afficher une vraie politique culturelle européenne, il faut s’en donner les moyens » (François de Mazières)
Il y a également un manque de financement évident de la part de l’UE. C’est vrai qu’avec un budget de 0,015 %, on reconnaît le caractère totalement dérisoire de l’effort fait par l’Europe en matière de culture.
Si l’on veut afficher une vraie politique culturelle européenne, il faut sans doute s’en donner les moyens.
Le problème majeur aujourd’hui qui émerge dans la politique culturelle est le numérique. Il est ainsi nécessaire de se poser la question de l’harmonisation fiscale.
La lutte contre les régimes dérogatoires, bénéficiant surtout aux GAFA
Google, Apple, Facebook et Amazon.
, est aujourd’hui l’un des enjeux majeurs de l’UE.
Les parlementaires français ont toujours été unis dans la défense de l’exception culturelle.
Un combat doit être mené par les parlementaires, en France et dans les instances européennes, pour exiger qu’il y ait une vraie prise en compte sur le plan budgétaire d’un effort culturel. »
François de Mazières, député des Yvelines (1re circonscription) et maire de Versailles
« Les États membres doivent pouvoir continuer à mener des politiques culturelles plus ambitieuses » (Patrick Raude)
Pour remédier à cela, il faudrait avoir une politique européenne plus ambitieuse en termes de financement de la création.
Il s’agit aussi de trouver un consensus entre les 28 États membres parallèlement à la construction d’un socle minimal d’obligations de financement de la création européenne.
Il est nécessaire d’admettre et de reconnaître en pratique un principe de subsidiarité dans le domaine de la politique culturelle. Les États membres doivent pouvoir continuer à mener des politiques culturelles plus ambitieuses.
Il est vrai que nous ne sommes pas dans un domaine où les directives d’harmonisation sont conséquentes.
Les auteurs aiment l’Europe. Ils demandent en retour des preuves d’amour. »
Patrick Raude, secrétaire général de la SACD
Société des auteurs et compositeurs dramatiques
« Nous avons besoin de l’Europe, d’une Europe partenaire » (Marcel Rogemont)
Nous sommes tout simplement dans l’Europe. À partir de là, la question ne se pose plus de savoir si l’Europe est un allié ou un adversaire.
Les droits acquis ne peuvent vivre s’ils ne sont pas défendus chaque jour. L’Europe est un terrain de lutte, tout comme la France. Pour lutter, il vaut mieux être à plusieurs. Il nous faut donc avoir un langage et des règles communes.
Nous avons besoin de l’Europe, d’une Europe partenaire. Ce n’est pas facile cependant car l’UE a été construite sur la base du marché unique, qui nous fait exister en qualité de consommateur.
La maximisation de la notion de consommateur au sein de l’UE nous fait quitter la notion de citoyenneté, de bien commun.
Nous avons du mal à définir ce bien commun d’un point de vue européen. »
Marcel Rogemont, député de la 8e circonscription d’Ille-et-Vilaine
« Il ne faut pas désespérer de l’UE » (Hervé Rony)
C’est pourquoi nous avons l’impression que dès que l’UE s’occupe de quelque chose, c’est pour casser un certain nombre de protections.
Dans le domaine de l’audiovisuel notamment, des systèmes d’exclusivité rendent souvent évidente la territorialisation des règles applicables.
Dans beaucoup d’États membres et notamment en France, il n’y a pas de prise de conscience des enjeux de la politique culturelle.
Peut-être aurions-nous pu imaginer un dispositif dérogatoire pour les champs des médias et de la culture ?
Il ne faut pas résumer notre relation à l’Europe à la seule Commission. Il y a aussi une Cour de justice de l’UE ou encore un Parlement.
Il y a une grande hypocrisie des États membres en matière de fiscalité. Nombre d’opérateurs ne paient pas les impôts qu’ils devraient payer.
Avec la Commission, il faut parfois parler très fort devant des gens qui n’ont pas du tout notre culture, mais je crois qu’il ne faut pas désespérer de l’UE.
La contradiction fondamentale entre l’organisation culturelle très étatique et l’harmonisation pèsera sur les débats. »
Hervé Rony, directeur général de la SCAM
Société civile des auteurs multimédia
Marie-Anne Ferry-Fall
Présidente @ European Visual Artists (EVA)
Présidente @ Sorimage
Directrice générale @ Société des Auteurs Dans les Arts Graphiques et Plastiques (ADAGP)
Services du Premier ministre Directeur du Développement des médias
2002 - 2005
Cabinet du Premier ministre Conseiller chargé des médias, du cinéma, des industries culturelles et du numérique
1999 - 2002
Direction du Budget Chef du bureau Énergie, industrie et financement de l’économie
1997 - 1999
Direction du Budget Responsable du financement et de la fiscalité des médias et du cinéma et du contrôle budgétaire des entreprises de l’audiovisuel public et du CNC