
« Aider la MC2 à être plus efficace face aux grandes transitions » (Sébastien Carnac, directeur R&D)
« Le cœur de mes missions est de porter des projets dits “innovants” avec comme objectif d’aider la MC2
Maison de la culture de Grenoble, Scène nationale
à être encore plus efficace et plus efficiente dans l’accompagnement d’artistes ou dans l’accès à la culture pour tous face aux grandes transitions que sont : la transition digitale et technologique ; la transition écologique et énergétique ; la transition liée aux questions d’inclusion et de diversité ; la transition socio-économique. Je dois aussi développer ces projets dans une dynamique de transversalité avec les autres directions, en cohérence avec le projet d’établissement d’Arnaud Meunier », déclare à News Tank Sébastien Carnac, qui a pris le poste de directeur recherche & développement de la Scène nationale de Grenoble en janvier 2025, le 17/02/2025.
Il s’agit d’une création de poste mais aussi « d’une fonction assez nouvelle dans le secteur public de la culture », selon Sébastien Carnac. Son arrivée s’inscrit parallèlement au développement d’un projet porté par la MC2 et la metteure en scène Émilie Anna Maillet dans le cadre de l’appel à projets « Expérience augmentée du spectacle vivant » du PIA4
4e Programme d’investissements d’avenir
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« Un des objectifs pour Sébastien Carnac est de repérer des appels à projets, et ainsi d’autres ressources, nous permettant de construire les prochaines briques de notre axe “spectacle vivant augmenté”. L’ambition étant de faire de la MC2 un véritable incubateur et un démonstrateur pour accompagner le développement et la structuration d’une filière de recherche et de création en environnement numérique », déclare Arnaud Meunier, directeur de la Scène nationale.
Genèse et ambitions de la direction R & D à la MC2, développements en cours et futurs en matière de création en environnement numérique, enjeux de transectorialité, Arnaud Meunier et Sébastien Carnac répondent aux questions de News Tank.
Pourquoi la création d’un poste de directeur recherche et développement au sein de la MC2 ?
Arnaud Meunier : Tout part toujours d’une rencontre avec une artiste, en l’occurrence avec Émilie Anna Maillet dont j’ai découvert le travail en 2014. Je l’ai associée à mon projet sur mon premier mandat à la MC2, et c’est elle qui m’a amené à m’intéresser au PIA4 4e Programme d’investissements d’avenir , et plus particulièrement l’appel à projets « Expérience augmentée du spectacle vivant » porté par la Caisse des dépôts et consignations. Cela nous a donné envie de réfléchir à la question de l’innovation dans le spectacle vivant. Cet appel à projets s’inscrivait tout à fait dans ce que ce que nous voulions développer à la MC2, dans l’esprit d’avant-garde qui a toujours été celui de cette maison depuis sa création en 1968.
Nous avons candidaté en consortium avec la compagnie d’Émilie Anna Maillet - ce qui était assez inédit - pour présenter son projet de création « To like Or not ». Dans celui-ci, elle propose, d’une part, un volet scénique qui raconte l’histoire d’une fête entre adolescents qui tourne mal en raison de l'“outing” forcé d’un des jeunes sur les réseaux sociaux. Ce volet scénique est augmenté par une installation en réalité virtuelle où les publics sont immergés dans la fête et deviennent eux-mêmes les protagonistes de cette soirée où tout a basculé.
Construire une filière de recherche et de création en environnement numérique autour des nouveaux récits pour la jeunesse »Le projet a été retenu pour une phase de développement sur trois ans, entre 2024 et 2026. Notre objectif à travers lui est de construire une filière de recherche et de création en environnement numérique autour des nouveaux récits pour la jeunesse, qui constituent l’une des priorités de mon projet d’établissement.
Le développement de ce projet est passionnant, mais aussi un peu déstabilisant car nous dialoguons avec des interlocuteurs assez inhabituels, plus habitués au monde des entreprises, avec tout un vocable particulier qu’il nous faut appréhender : le fait d’“amorcer”, de “dérisquer”, d’“expérimenter”, de chercher un modèle économique…
J’ai découvert un champ qui m’a passionné, aussi parce que nous avons la chance à la MC2 d’être sur un territoire atypique : l’aire grenobloise est très riche en entreprises de la tech, l’Université Grenoble Alpes très en pointe sur les technologies et la science. C’est dans ce contexte fertile que s’invente un regroupement d’entreprises et d’organisations tournées vers l’innovation appelé « Alp Valley » (un peu sur le modèle de la Silicon Valley) avec lequel nous développons un nouveau projet complémentaire.
Un pôle territorial régional autour des ICC
Industries culturelles et créatives
est aussi en train d’émerger autour de grandes villes de la région, parmi lesquelles Lyon qui est très orientée sur le cinéma ; Annecy qui est depuis très longtemps tournée vers le film d’animation ; et Grenoble qui se positionne maintenant sur le spectacle vivant augmenté. Cette dynamique régionale permet de créer des synergies et de travailler avec d’autres acteurs, comme le pôle PIXEL à Lyon. Sur le territoire grenoblois, nous travaillons aussi en complémentarité avec la Scène nationale L’Hexagone à Meylan
Scène nationale située à Meylan, commune appartenant à Grenoble-Alpes Métropole• Statut : association loi 1901• Ouverture : 1976• Label « Scène nationale » : 1991• Depuis 2001 : inscription de la…
qui s’est plus particulièrement positionnée sur les compétences et métiers d’avenir en travaillant des installations pour des lieux non dédiés, là où à la MC2 nous cherchons plutôt à produire des formes augmentées par les outils numériques à partir des disciplines traditionnelles (théâtre, danse, cirque, musique) pour les plateaux.
Quelles sont les missions de cette direction R & D Recherche et développement ?
Sébastien Carnac : La R & D revêt trois composantes : la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement expérimental. La MC2 se positionne plutôt sur ce troisième volet.
Le cœur de mes missions est de porter des projets dits « innovants » avec comme objectif d’aider la MC2 à être encore plus efficace et plus efficiente dans l’accompagnement d’artistes ou dans l’accès à la culture pour tous face aux grandes transitions que sont :
- La transition digitale et technologique ;
- La transition écologique et énergétique ;
- La transition liée aux questions d’inclusion et de diversité ;
- La transition socio-économique.
Je dois aussi développer ces projets dans une dynamique de transversalité avec les autres directions, en cohérence avec le projet d’établissement d’Arnaud Meunier.
Arnaud Meunier : Un des objectifs pour Sébastien Carnac est de repérer des appels à projets, et ainsi d’autres ressources, nous permettant de construire les prochaines briques de notre axe « spectacle vivant augmenté ». L’ambition étant de faire de la MC2 un véritable incubateur et un démonstrateur pour accompagner le développement et la structuration d’une filière de recherche et de création en environnement numérique.
Faire de la MC2 un véritable incubateur et un démonstrateur »Par incubateur, j’entends le fait d’accompagner dramaturgiquement et technologiquement les artistes, d’où qu’ils viennent et quels que soient les développements dramaturgiques et technologiques qu’ils cherchent.
Le volet démonstrateur consiste, lui, à travailler sur l’acclimatation des publics, des professionnels et des équipes artistiques à tous ces nouveaux projets qui sont très atypiques. Cela signifie, concrètement, que chaque saison la MC2 pourrait programmer, voire produire, ce type de projets et ainsi travailler à la montée en compétence des publics, des professionnels et des équipes.
Plutôt que de subir cette révolution technologique que l’on est en train de vivre collectivement - et l’intelligence artificielle en est une évidemment -, nous voulons en être acteurs à la MC2 et servir l’intérêt général, tout en étant très vigilants sur les différents développements de toutes ces nouvelles technologies.
Avez-vous connaissance de fonctions similaires dans le réseau des Scènes nationales et plus largement dans le réseau des institutions culturelles subventionnées ?
Sébastien Carnac : C’est une fonction assez nouvelle dans le secteur public de la culture, même si l’on peut observer une direction Innovation et Moyens de Recherche à l’Ircam Institut de recherche et coordination acoustique/musique ou une direction de l’innovation au Centquatre-Paris. Dans ces deux cas, il s’agit d’institutions atypiques et d’une certaine envergure qui ont donc des besoins en termes de recherche et de développement.
Aller travailler avec des secteurs avec lesquels le secteur culturel n’a pas l’habitude de coopérer. »Nous nous lançons dans cette démarche avec beaucoup d’humilité. Cette direction est cristallisée aujourd’hui par un poste, mais la R & D existe dans toutes les structures culturelles de manière éclatée. Et la création artistique, ça n’est en réalité que de la R & D. Peut-être que ce que nous mettons en œuvre aujourd’hui va essaimer ailleurs.
Là où la MC2 innove, c’est dans l’approche transectorielle de ces futurs développements, en allant travailler avec des secteurs avec lesquels le secteur culturel n’a pas l’habitude de coopérer.
La création de ce poste implique-t-elle une réorganisation des équipes ou des actions de la MC2 ? Y’a-t-il par ailleurs une nouvelle répartition des moyens ?
Arnaud Meunier : Nous avons vraiment cherché à transformer le modèle économique de la MC2 : on ne fait pas une chose à la place d’une autre. Nous cherchons de nouvelles ressources pour développer la structure. La MC2 est un outil avec un bâtiment très grand, des équipes très compétentes et donc, aussi, un niveau de budget qui lui permet d’avoir une taille critique suffisante pour pouvoir se positionner sur des appels à projets du type de ceux déployés dans le cadre du PIA4 et de France 2030 Plan d’investissement de 54 milliards d’euros sur 5 ans lancé par l’État et visant à accélérer la transformation des secteurs clés de l’économie par l’innovation. .
Nos institutions ont besoin du soutien public pour se saisir pleinement des innovations technologiques »Au moment où il y a des inquiétudes réelles sur les subventions au secteur culturel, il est important de redire à quel point nos institutions ont besoin du soutien public pour se saisir pleinement des innovations technologiques et ne pas les laisser à la seule main du champ privé et du divertissement. La MC2 se positionne vraiment dans une optique visant à faire sens et à créer un espace de création artistique au service des artistes et des publics.
Quels sont les futurs développements prévus ? Avec quels autres artistes et sur quels types de projets travaillez-vous aujourd’hui ?
Sébastien Carnac : La première étape dans laquelle nous sommes aujourd’hui avec l’appel à projets « Spectacle vivant augmenté » doit permettre de structurer les choses à l’échelle de la maison pour pouvoir ensuite travailler à mieux accompagner les artistes qui ont une appétence pour le numérique, la transectiorialité, la transdisciplinarité, ou ceux qui souhaiteraient découvrir tous ces aspects.
Nous nous sommes inscrits tout récemment dans un consortium pour répondre à un nouvel appel à projets France 2030, « Culture immersive et métavers Univers virtuel persistant, collectif, ouvert en permanence, où les individus/avatars peuvent interagir et explorer en temps réel grâce à des dispositifs de réalité virtuelle ou augmentée », pour construire une plateforme numérique d’aide à la création et à la diffusion d’œuvres artistiques en XR Toutes les réalités alternatives, virtuelles, augmentées, mixtes, etc. .
Arnaud Meunier : Ces derniers mois j’ai été invité dans plusieurs jurys, notamment le Prix SVSN Spectacle vivant - scènes numériques porté par Dark Euphoria et le Grenier À Sel, qui ont été autant d’occasion de découvrir des artistes, les projets qu’ils développent, leurs désirs… J’ai aussi participé au jury du Prix Nouveaux Horizons porté par l’Institut français d’Argentine autour des ICC, et qui va permettre de créer des ponts de collaboration entre l’Argentine et la France.
En ce moment, nous accompagnons la chorégraphe Rocio Berenguer qui a un projet avec des robots. Nous sommes en train de la mettre en relation avec une entreprise sur le territoire grenoblois qui est spécialisée en robotique. Nous accompagnons également des artistes locaux, par exemple le collectif COIN qui est installé à Grenoble. Nous sommes très attentifs à ce que les nouveaux développements que nous opérons servent à la fois aux équipes locales et à des artistes qui peuvent venir de très loin, comme l’Amérique latine.
En quoi le profil de Sébastien Carnac était intéressant pour porter tous ces nouveaux développements ?
Arnaud Meunier : Le PIA4 nous a amenés à réfléchir sur le recrutement d’une équipe dédiée qui ne soit pas que « culture ». Sébastien avait l’expérience sur différents champs complémentaires qui nous a intéressés. Pour l’instant ces profils sont rares, on a soit des personnes très tech et pas du tout culture, soit des personnes très culture et pas du tout tech.
Sébastien Carnac : J’ai d’abord fait des études en sciences, puis en management du spectacle vivant que j’ai complétées par une formation diplômante en Arts du Spectacle - Danse à l’Université Paris 8 et par une formation certifiante en Pilotage de l’innovation à l’École Polytechnique. J’ai donc ce double profil, même si j’ai toujours travaillé dans le secteur culturel, et en particulier dans le secteur chorégraphique. Mais au cours de ma carrière, peu importent les postes que j’ai eus, les connexions entre arts, sciences et numériques m’ont toujours intéressé.
Les profils hybrides sont de plus en plus recherchés pour pouvoir répondre aux mutations à l’œuvre dans le secteur culturel »Le dialogue entre le secteur culturel et le monde économique est basé sur une relation de mécénat. Cette approche est intéressante mais j’ai toujours trouvé qu’on n’allait pas assez loin dans cette coopération. C’est la raison pour laquelle j’ai créé une en 2013 à Bordeaux un pôle de coopération « arts vivants et nouvelles technologies », dans le cadre duquel j’ai travaillé sur ces dimensions d’innovations croisées et de transectorialité.
Le recrutement dans le secteur culturel représente un vrai enjeu aujourd’hui. Et les profils hybrides sont de plus en plus recherchés pour pouvoir répondre aux défis et mutations à l’œuvre dans le secteur culturel. À Sciences Po ou dans des universités, on observe de plus en plus de doubles cursus qui attestent d’un mouvement vers plus d’hybridation.

Arnaud Meunier
Directeur @ MC2 Maison de la Culture de Grenoble - Scène nationale
Mises en scène :
- Tout mon amour de Laurent Mauvignier (2020)
- Candide de Voltaire (2019)
- J’ai pris mon père sur mes épaules de Fabrice Melquiot (2019)
- Je crois en un seul dieu de Stefano Massini (2017)
- Truckstop de Lot Vekemans (Festival d’Avignon, 2016)
• 2014 : Grand prix du Syndicat de la critique pour la mise en scène de Chapitres de la chute, Saga des Lehman Brothers, de Stefano Massini.
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Parcours
Fondateur
Président
Directeur
Directeur
Établissement & diplôme
Diplômé
Fiche n° 3283, créée le 02/04/2014 à 09:53 - MàJ le 18/02/2025 à 10:44
Sébastien Carnac
Directeur recherche et développement @ MC2 Maison de la Culture de Grenoble - Scène nationale
Parcours
Directeur recherche et développement
Directeur
Free lance en communication en danses urbaines et contemporaines
Responsable publicité, Internet et relations presse
Responsable communication
Chargé de communication et des relations presse
Fiche n° 53450, créée le 13/02/2025 à 17:53 - MàJ le 18/02/2025 à 11:21
MC2 Maison de la Culture de Grenoble - Scène nationale
• Établissement public de coopération culturelle subventionné par le ministère de la Culture et de la Communication, la Ville de Grenoble, le Département de l’Isère, la Région Rhône-Alpes.
• 1968 : construction de la Maison de la culture de Grenoble
• 17/09/2004 : inauguration de la MC2 nouvelle génération
• Équipements scéniques :
- un auditorium de 998 places (solistes et orchestres)
- une salle de 1028 places (théâtre, danse, opéra)
- une salle de 244 places (solos d’acteurs, petites formes artistiques)
- une salle de création de 700 m²
- deux studios de danse
- un studio de répétition pour le théâtre
- un studio d’enregistrement.
• Fusion avec le Centre dramatique national des Alpes en 2013
• Gère le Centre chorégraphique national de Grenoble, dirigé par Aina Alegre et Yannick Hugron
• Salariés permanents ETP : 60
• Budget moyen : 12 M€
• Directeur : Arnaud Meunier (depuis le 01/01/2021)
• Contact : Elfée Patetta, directrice de la communication
• Tél. : 04 76 00 79 79
Catégorie : Théâtre
Adresse du siège
4 Rue Paul Claudel38000 Grenoble France
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Fiche n° 399, créée le 27/09/2013 à 13:23 - MàJ le 18/02/2025 à 11:21
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