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Think 2022 : « La clause environnementale figurera dans tous nos appels à projets » (Eva Nguyen Binh)

News Tank Culture - Paris - Actualité n°262905 - Publié le 08/09/2022 à 13:00
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©  Seb Lascoux
Eva Nguyen Binh, Jacques Renard, Anne-Florence Duliscouët - ©  Seb Lascoux

« Parce que nous initions, soutenons ou co-finançons des projets, nous avons un effet levier assez fort. À partir de maintenant, la clause environnementale figurera dans tous nos appels à projets. Nous les modulerons pour que ce soit une force d’encouragement, notamment pour les Instituts français et les Alliances françaises, et non un repoussoir », déclare Eva Nguyen Binh, présidente de l’Institut français, qui intervenait comme Grand témoin lors du Grand Thème « Circulation des artistes et des œuvres, et décarbonation : comment les concilier ? » dans le cadre de l’événement professionnel Think Culture organisé par News Tank au Centre Pompidou • Établissement public culturel pluridisciplinaire ouvert en 1977.• Réunit le MNAM (Musée national d’art moderne), le CCI (Centre de création industrielle), le DCC (Département culture et création)… (Paris 4e) le 06/09/2022.

« Sur le sujet de la mobilité, l’Institut français ne soutient plus de tournées à date unique. Nous soutenons des tournées avec minimum trois dates. Et même trois dates, ce n’est pas beaucoup, nous allons sans doute relever le seuil. Nous demanderons aussi au maximum l’allongement des projets sur place. D’ailleurs, beaucoup de gens le font déjà. Ce n’est pas la panacée mais c’est important », ajoute la présidente de l’Institut français qui annonce une feuille de route en faveur de la transition écologique accompagnée de différentes expérimentations.

« Je souhaite également voir comment on peut inventer de nouvelles formes. Tout le monde a été frappé par la position très radicale du chorégraphe Jérôme Bel qui a décidé de ne plus prendre l’avion et de réinventer la conception de spectacles à distance. Nous envisageons de lancer un appel à projets sur la création sans voyage. C’est un peu disruptif mais il faut inventer des choses », indique-t-elle.


« Laissons-nous la possibilité d’être agréablement surpris » (Eva Nguyen Binh)

  • L’Institut français a pour mission de promouvoir la langue et la culture française à l’étranger et d’encourager le dialogue des cultures, la diversité culturelle, notamment à travers l’accueil d’artistes étrangers en France.
  • Dès mon arrivée à la présidence de l’Institut français en juillet 2021, j’ai souhaité m’emparer du sujet de la transition écologique parce qu’il me semble que l’IF Institut français , en ce qu’il a pour mission de promouvoir les valeurs de la France, doit s’emparer des thèmes sociétaux. J’ai donc inscrit la réflexion sur la transition écologique et nos pratiques dans mon projet d’établissement.
  • Comme l’a dit Matthias Leullier Directeur général adjoint @ Live Nation France
     de Live Nation précédemment, il faut rester humble. Je n’ai pas la prétention d’avoir les réponses à ce sujet extrêmement complexe, et s’il y avait des réponses faciles cela se saurait, mais il faut en revanche rester extrêmement déterminé.
  • Ce sujet est donc inscrit comme une de mes priorités transversales pour mon action à la présidence de l’IF.

Une méthodologie pour se mettre en ordre de marche

  • D’abord, il était important que le projet soit porté au plus haut niveau de l’établissement, ce qui est le cas.
  • Ensuite, j’ai fait appel aux gens motivés au sein de l’IF, sur la base du volontariat, plutôt que de demander la désignation de référents dont on ne sait pas s’ils sont motivés par le sujet. Or, il se trouve qu’au sein de l’IF beaucoup de gens le sont, d’abord à titre personnel, mais aussi parce qu’ils travaillent avec des artistes et des professionnels qui sont déjà très sensibilisés à ces questions. Le niveau de réflexion au sein du milieu culturel français est élevé. Même si nous avons des frustrations car on n’a pas toutes les réponses, qu’on n’avance pas assez vite au vu de l’urgence climatique, le niveau est très avancé.
  • Nous avons donc créé ce groupe informel et j’ai nommé une référente sur ce sujet de la transition écologique. Ensemble, nous avons testé des idées, émanant de nous ou inspirées par d’autres.
  • Enfin, nous avons travaillé avec un cabinet de consultants spécialisé parce que ce sont des sujets très techniques et qui peuvent être rebutants. Le sujet de la transition écologique peut, il est vrai, parfois être décourageant.

Une feuille de route

  • Aujourd’hui, après tout ce travail et des concertations en interne, nous avons un plan d’actions, une feuille de route, qui sera publiée sur notre site Internet d’ici la fin du mois. Mais pour autant le travail n’est pas terminé. C’est un travail qui est sans cesse remis sur la table.
  • Une des spécificités de l’IF est que nous n’organisons quasiment rien nous-mêmes, mais le faisons via les postes ou nos partenaires à l’étranger. Nous nous sommes bien sûr concertés avec ce réseau et c’était important parce que le questionnement sur le sujet écologique est de niveau très différent à travers le monde. Or nous avons pour objectif d’emmener tout le monde avec nous. On ne peut pas traiter de la même façon un Institut qui travaille dans un pays en développement où ces sujets ne sont pas du tout au cœur des priorités qu’un Institut dans un pays très développé où cette préoccupation est constante. Nous avons fait ces consultations pour adapter au mieux notre feuille de route avec l’idée de ne pénaliser personne et d’encourager tout le monde.
  • Parce que nous initions, soutenons ou co-finançons des projets, nous avons un effet levier assez fort. À partir de maintenant, la clause environnementale figurera dans tous nos appels à projets. Nous les modulerons pour que ce soit une force d’encouragement, notamment pour les Instituts français et les Alliances françaises, et non un repoussoir.
  • Notre feuille de route comprend trois axes :
    • D’abord, nous devons être le plus exemplaires possible. Nous emménageons dans un bâtiment HQE Haute qualité environnementale , allons faire une charte du transport en avion pour nous-mêmes, etc.
    • Ensuite, pour nos partenaires, nous espérons être des accélérateurs de changement. Cela passera par nos appels à projets, dans les thèmes que nous mettrons à l’honneur dans les programmes que nous soutiendrons, dans la façon dont nous soutiendrons les uns et les autres, et dans les projets que nous co-financerons. La clause environnementale sera désormais systématiquement un des critères de choix des projets qui seront soutenus.
    • Enfin, le plaidoyer, la formation, la sensibilisation. En tant qu’institution qui relève du MEAE Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et du MC Ministère de la Culture , eux-mêmes très engagés, nous sommes à l’intersection entre le pouvoir politique et tous les partenaires publics et privés avec lesquels nous travaillons, mais aussi au croisement entre le national et l’international. Ce positionnement est très intéressant. En 2025, ce seront les dix ans de l’Accord de Paris et cela va nous motiver à nous saisir de ce rôle de plaidoyer, alors que le niveau de conscientisation est très inégal. Or, par le biais des Instituts, des Alliances, des ambassades, on peut amener ces sujets et leur faire prendre de l’ampleur. Notamment à travers la formation des agents du réseau, qui est une de nos missions. 

Initiatives, expérimentations et « droit au tâtonnement »

  • Sur le sujet de la mobilité, l’Institut français ne soutient plus de tournées à date unique. Nous soutenons des tournées avec minimum trois dates. Et même trois dates, ce n’est pas beaucoup, nous allons sans doute relever le seuil. Et nous demanderons au maximum l’allongement des projets sur place. D’ailleurs, beaucoup de gens le font déjà. Ce n’est pas la panacée mais c’est important.
  • Je souhaite également voir comment on peut inventer de nouvelles formes. Tout le monde a été frappé par la position très radicale de Jérôme Bel qui a décidé de ne plus prendre l’avion et de réinventer la conception de spectacles à distance. Nous envisageons de lancer un appel à projets sur la création sans voyage. C’est un peu disruptif mais il faut inventer des choses.
  • Nous aimerions aussi dédier un de nos Focus Dispositif initié par l’Institut français, destiné à accompagner les professionnels étrangers dans le repérage des scènes artistiques françaises. (programme qui vise à faire venir en France des programmateurs étrangers pour repérer talents et partenaires) à la transition écologique. L’idée serait de montrer où nous en sommes dans la réflexion sur ces sujets, de motiver nos partenaires étrangers à y travailler avec nous et aussi, pour tous, d’apprendre des autres. Ce sont quelques exemples de ce que nous allons décliner cette année. Cela nécessite de la pédagogie mais c’est assez motivant.
  • Ce seront des expérimentations, mais laissons-nous la possibilité d’être agréablement surpris. Il est clair que le numérique ou la création à distance ne remplacent pas ce qui fait que nous sommes des êtres humains : la chair, les ondes, la rencontre… Nous sommes là pour trouver des justes milieux. 
    Eva Ngyen Binh - ©  Seb Lascoux
  • Il y a un autre sujet, qui ne relève pas de nous mais dont nous devons parler car c’est tous ensemble que nous ferons avancer les choses, c’est celui de l’innovation technologique. Quand on parle de l’hydrogène, de la motorisation, des transports, c’est aussi de là que les choses vont venir. Est-ce qu’il y a des liens à faire entre les scientifiques et les artistes, c’est une question que je me pose, tout comme celle de la sensibilisation à l’importance de la recherche, de la science. Cela existe mais tous ces efforts doivent être faits ensemble, il ne faut pas qu’il y ait de segmentation ni de sectorialisation sur ces sujets.
  • J’ai participé à divers colloques, pour certains organisés par nos postes ou avec nos homologues du British Council ou du Goethe Institute, et à vrai dire on tourne assez vite en rond, une fois qu’on a dit qu’on prendrait moins l’avion. L’idée pour nous est donc d’être une espèce de laboratoire, de lancer des idées un peu étonnantes. Cela fait partie de notre souhait de voir comment on peut avancer au-delà de ce qui s’est déjà fait. Et puis je revendique le droit à l’erreur, au tâtonnement, Le problème est complexe, on va peut-être tâtonner et c’est peut-être en tâtonnant qu’on trouvera des choses formidables.

Une forte attente, inégalement partagée

  • Je ressens une forte attente d’un peu partout : de nos partenaires français, du réseau à l’étranger, d’une partie des collaborateurs de l’IF, et je ne dirais pas que c’est une attente qui provient uniquement des jeunes. On a tendance à penser que les jeunes générations sont très conscientisées. Mais ça dépend qui, certains sont extrêmement volontaires, voire militants, et d’autres n’en ont pas grand-chose à faire. La réalité est que nous devons porter ce sujet de manière transgénérationnelle et cela commence à mon avis par l’information et la formation. L’information est là depuis des années, c’est vrai. Il faut jongler avec ceux qui ne veulent pas voir mais aussi avec ceux que cela angoisse fortement. Il y a une façon de transmettre l’information qui peut être un peu positive. Et on est positif dans la mesure où on commence à être dans l’action.
  • Je sens aussi une attente du réseau parce que ce sujet n’est pas simple à appréhender. Quels outils, quelle formation on leur propose ? Cela dépend aussi des pays. Dans certains, cela n’est pas un sujet car il y a d’autres priorités, dans d’autres il y a des déclarations officielles qui ne sont pas suivies d’actes, ailleurs il peut aussi y avoir un décalage entre les attentes d’une partie de la population et les autorités. Et, à l’inverse, certains postes se sont vraiment emparés du sujet et ont été assez novateurs. Par exemple en Chine, de nombreuses initiatives ont été prises à tel point que cela soulève de nouveaux questionnements car, vu la taille du pays, comment se déplacer sans prendre l’avion alors qu’on prône la sobriété et la réduction des émissions carbone ? Il faut avancer tout en se mettant une pression raisonnable à tenir.
  • Dans les pays comme le Cambodge ou le Vietnam où j’ai travaillé, il y a une conscience de plus en plus forte de ces sujets. Mais se pose aussi la question du niveau de vie. Ces pays connaissent un développement très fort mais le niveau de vie n’est pas le nôtre. Le sujet environnemental commence à toucher les classes aisées, mais pas tout le monde. Comment on préserve l’élévation de la qualité de vie tout en ayant un impact sur l’environnement raisonnable et limité ? C’est possible mais ce n’est pas à ce jour la mentalité d’une partie de la population.
  • Ce qui m’a frappée lors de nos consultations, c’est que les sujets environnementaux et climatiques faisaient encore l’objet de projets souvent placés en bas de la pile. Pour nous, un des sujets va donc être de faire en sorte d’embarquer un maximum de monde dans les projets, dans les réflexions, pour que ce ne soit pas subi mais approprié !

    Eva Nguyen Binh

Eva Nguyen Binh


• Administratrice de l’État du grade transitoire.

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Parcours

Institut français
Présidente
Royaume du Cambodge
Ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire de la République française
Ambassade de France au Vietnam
Conseillère de coopération et d’action culturelle, directrice de l’Institut français du Vietnam
Groupe Michelin
Chargée des affaires internationales au sein de la direction des affaires publiques

Fiche n° 43755, créée le 02/06/2021 à 15:55 - MàJ le 19/06/2024 à 17:53

Institut français

• Opérateur du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et du ministère de la Culture pour l’action culturelle extérieure de la France.
Il agit avec l’ensemble du réseau des établissements culturels français à l’étranger, composé des Instituts français et des Alliances françaises.
• Il soutient environ 2 000 projets culturels ou artistiques par an.
• 98 Instituts français, 830 alliances françaises et 131 services de coopération et d’action culturelle.
• Présidence : Eva Nguyen Binh, depuis le 01/07/2021
• Directeur général : Hugues Ghenassia-de Ferran, depuis le 13/05/2024
• Directeur de la communication et du mécénat : Jean-Philippe Rousse
• Tél. : 01 53 69 83 00


Catégorie : Etat


Adresse du siège

25, rue de Tolbiac
75013 Paris France


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Fiche n° 44, créée le 27/09/2013 à 13:23 - MàJ le 19/11/2024 à 11:00

News Tank Culture (NTC)

• Média d’information indépendant et innovant, spécialisé dans l’actualité de la musique, du spectacle vivant, des musées, monuments et du patrimoine et, depuis 2023, des nouvelles images.
• Création : septembre 2012
• Proposant à la fois un fil d’actualités, des dossiers de fonds, des interviews et de grands entretiens, des data et un annuaire des professionnels et des organisations, News Tank Culture s’adresse aux dirigeants et acteurs de la culture. Il organise également chaque année Think Culture, une journée d’échange et de débat autour de l’innovation dans le pilotage de la culture, avec la volonté de décloisonner les secteurs culturels.

• Direction :
- Bertrand Dicale, directeur général
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• News Tank Culture est une filiale de News Tank Network, créée par Marc Guiraud et Frédéric Commandeur, qui a également développé :
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Le groupe emploie une centaine de collaborateurs.


Catégorie : Média
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Adresse du siège

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Fiche n° 6882, créée le 03/04/2018 à 03:02 - MàJ le 17/09/2024 à 17:06

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