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« L’art immersif est une opportunité de faire passer des messages » (M. Ziegler, NewImages Festival)

News Tank Culture - Paris - Entretien n°389411 - Publié le
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Michele Ziegler - ©  Nicopol

« Le NewImages Festival est né il y a huit ans de la fusion de deux événements, I Love Transmedia et le Paris Virtual Film Festival. Nous sommes très connus dans le domaine de la VR Virtual reality - Réalité virtuelle , mais l’immersif revêt un sens beaucoup plus large », déclare à News Tank Michele Ziegler, directrice du festival, le 10/03/2025. Le Forum des images accueille la 8e édition du NewImages Festival du 09 au 13/04/2025 à Paris. Il réunit créateurs, professionnels et public autour de la création immersive et des nouvelles narrations avec « près de » 30 œuvres réparties entre la XR Extended Reality, ou Réalité Étendue Competition et la section Hors Compétition. En 2025, le festival a pour thème « L’Altérité » avec des propositions explorant les réalités marginales et la notion d’identité.

« Nous pensons avant tout au public de demain. Nous voulons transmettre des messages pour rendre le monde (un peu) meilleur. Ces types d’œuvres permettent de toucher un public plus jeune », indique Michele Ziegler. Lors du festival, le XR Development Market présentera 54 projets en recherche de financements tandis que 80 projets figureront au XR Distribution Market. Les Industry Days proposeront également 25 conférences, ateliers et études de cas sur des sujets comme la monétisation de la création XR et la décolonisation des identités culturelles.

« Le budget de la manifestation, même sans la crise actuelle, a changé parce que le festival a été initialement conçu comme un événement audiovisuel avec des chaises tournantes et des casques. Or, le secteur a évolué : il nécessite désormais de nombreux ordinateurs, de multiples casques et surtout beaucoup d’espace, en termes de mètres carrés. L’enceinte du Forum des images ne suffit plus, et monter des tentes sous la Canopée du Forum des Halles n’est pas idéal », précise Michele Ziegler qui répond aux questions de News Tank.


Quelle est la place du festival NewImages au niveau international ?

NewImages Festival constitue le plus grand marché mondial entièrement dédié à l’art immersif. L’événement joue un double rôle : une plateforme professionnelle mettant en relation créateurs, studios et institutions culturelles (musées, galeries) du monde entier, et un espace d’acculturation pour le grand public. Pendant cinq jours, le festival propose ainsi une exposition gratuite permettant aux visiteurs de découvrir des œuvres immersives encore peu accessibles au quotidien.

Vous parlez d’art immersif. Pourquoi ?

Le festival est né il y a huit ans de la fusion de deux événements, I Love Transmedia et le Paris Virtual Film Festival. Nous sommes très connus dans le domaine de la VR Virtual reality - Réalité virtuelle , mais l’immersif revêt un sens beaucoup plus large. Par exemple, nous présentons cette année un spectacle sonore immersif où le public, équipé de casques audio, participe à une déambulation guidée sur scène. L’art immersif peut aussi prendre la forme d’une projection pour planétarium, d’un dôme, ou de projections sur les murs. Le slogan du festival est « création numérique et mondes virtuels ». Nous explorons tous les développements de ces domaines, avec de nombreuses propositions très variées.

Notre programmation comprend une compétition internationale - XR Extended Reality, ou Réalité Étendue Competition - qui a reçu 165 œuvres candidates venues d’une cinquantaine de pays.

Nous pensons avant tout au public de demain »

Après sélection, 14 œuvres sont exposées cette année sous la Canopée des Halles à Paris, accessibles aux professionnels comme au grand public. Nous proposons également une section Hors Compétition sur le thème de l’altérité, en lien avec l’actualité mondiale avec notamment la présentation d’une intelligence artificielle féministe interactive qui démontre comment une IA Intelligence artificielle reflète ce qu’on y intègre.

Nous pensons avant tout au public de demain. Nous voulons transmettre des messages pour rendre le monde (un peu) meilleur. Ces types d’œuvres permettent de toucher un public plus jeune. Aujourd’hui, les jeunes sont tellement sollicités par les actualités en temps réel qu’ils sont moins facilement touchés par un documentaire à la télévision que s’ils vivent une expérience en réalité virtuelle, sous un dôme, à travers une installation ou un jeu vidéo. Pourquoi ? Parce qu’il y a une interaction, et parce que l’émotion et le message se transmettent différemment. L’art immersif est une opportunité de faire passer des messages, mais aussi de montrer des expériences esthétiquement très riches, sublimes si on veut faire court, ou de préserver une mémoire.

Aujourd’hui, ces productions reposent plutôt sur des modèles issus du secteur de l’audiovisuel, avec des processus allant de l’écriture à la post-production. C’est une bonne chose, mais par moments, cela peut limiter la création, et donc l’innovation dans le récit. Or pour moi, l’innovation narrative est justement ce qui est intéressant pour le public de demain. Si l’on reproduit exactement les mêmes façons de faire et les mêmes modes de narration, les expériences n’auront pas l’impact souhaité et seront plutôt du divertissement. C’est là que se situe la différence entre un produit mainstream et une création véritablement artistique.

Quelle est la part française ou francophone dans ce secteur de l’art immersif ?

Aujourd’hui, la France est l’un des leaders mondiaux de l’immersif, grâce au travail du CNC Centre national du cinéma et de l’image animée et de l'Institut français • Opérateur du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et du ministère de la Culture pour l’action culturelle extérieure de la France.• Il agit avec l’ensemble du réseau des établissements… , et de tout le réseau d’associations. Nous collaborons avec eux pour la diffusion d’œuvres et l’établissement de partenariats internationaux favorisant la coproduction. Nos studios comptent parmi les meilleurs au monde et notre secteur est déjà très structuré en France. Nous disposons également d’associations qui fédèrent les auteurs et indépendants, comme EliXR, ou encore les producteurs, comme PXN. Pour l’art numérique au sens large, il existe le réseau Hacnum Réseau national des arts hybrides et cultures numériques . Notre enjeu actuel est de développer une solidarité pour maintenir cette avance et défendre nos valeurs, comme nous le faisons déjà pour le cinéma indépendant français.

Toutefois, d’autres pays structurent leur écosystème immersif, particulièrement ceux du Benelux qui investissent dans ce domaine. Leur présence est de plus en plus marquée dans les palmarès et sélections des festivals. C’est une évolution positive, mais la France doit désormais renforcer ses initiatives auprès du grand public et soutenir l’ensemble de son écosystème pour conserver son avance, que nous sommes en train de perdre.

Notre festival joue un rôle important en accueillant des délégations internationales venues s’inspirer de notre modèle et pour impulser des opportunités de co-productions. Nous recevons ainsi une délégation coréenne d’une vingtaine de personnes pour la deuxième année consécutive. Les Taïwanais sont également très présents, ayant développé leur secteur grâce aux relations avec la France. Nous accueillons également des représentants du Japon, d’Europe et de pays qui entrent sur le marché international de la création immersive comme le Kenya, qui constitue une force importante dans le domaine du jeu vidéo en Afrique.

Et côté compétition ?

La proximité géographique fait que des œuvres françaises ou des coproductions françaises sont présentes dans la compétition, mais ce n’est pas le seul critère de sélection. Nous intégrons dans notre processus l’avis de personnes qui ne sont pas expertes en XR, ce qui apporte un regard neuf par rapport au nôtre qui est plus habitué. La difficulté majeure dans notre évaluation réside dans les disparités de moyens entre les pays. Certaines œuvres d’Amérique latine sont réalisées par deux personnes ayant travaillé quelques mois, quand d’autres productions bénéficient d'1 M€ de budget. La comparaison est complexe, mais notre compétition n’est pas conçue comme une vitrine spécifique de la France.

Nous collaborons néanmoins avec French Immersive Studios pour développer, en 2026 une section plus spécifiquement française, dont la mise en œuvre dépendra des espaces disponibles. Idéalement, nous souhaiterions créer différentes catégories tenant compte de paramètres comme les premières œuvres, qui ne peuvent être jugées selon les mêmes critères d’expérience. Pour l’instant, des contraintes budgétaires nous empêchent de multiplier les catégories et d’élargir davantage le festival, malgré notre désir de le faire.

Quelles sont les nouveautés de cette édition ?

Plusieurs évolutions sont en cours. Nous observons une actualité forte dans le secteur français avec France 2030 Plan d’investissement de 54 milliards d’euros sur 5 ans lancé par l’État et visant à accélérer la transformation des secteurs clés de l’économie par l’innovation. , qui apporte un soutien important aux Location Based Experience ou Entertainment. Nous distinguons ces deux notions, mais il s’agit essentiellement d’œuvres multi-utilisateurs, déambulatoires, permettant un modèle économique basé sur la billetterie. Cette tendance se retrouve naturellement dans les œuvres sélectionnées dans notre compétition.

Parallèlement, nous suivons les développements dans le métavers Univers virtuel persistant, collectif, ouvert en permanence, où les individus/avatars peuvent interagir et explorer en temps réel grâce à des dispositifs de réalité virtuelle ou augmentée . Bien que peu médiatisé actuellement, il faut noter que la monétisation s’est implantée dans VRChat depuis un an et demi, permettant aux créateurs de tirer des revenus de leurs créations.

Notre approche nous permet d’anticiper les pratiques futures et les modèles économiques de demain »

Ce système s’étend progressivement à d’autres plateformes. Un développement parallèle s’opère donc dans cette autre culture, offrant d’importantes opportunités pour la créativité narrative et la construction de mondes virtuels. Cette année, notre compétition intègre deux mondes virtuels, ce qui est une première.

Ces développements correspondent aux pratiques des jeunes générations. L’usage s’apparente aux réseaux sociaux. Sur Snapchat, des téléréalités attirent des milliers de spectateurs et génèrent des tendances. C’est toute une culture souvent négligée dans les analyses. Notre rôle est précisément de montrer cette ouverture, contrairement à d’autres festivals qui se spécialisent sur un segment précis. Notre approche nous permet d’anticiper les pratiques futures et les modèles économiques de demain, ce qui est crucial pour les artistes et les institutions culturelles.

Comment cohabitent ces différents modèles économiques au sein de l’événement ?

Nous accueillons des participants issus d’horizons très divers en plus du secteur de la XR : professionnels du jeu vidéo, du documentaire, du cinéma, de galeries d’art et responsables de lieux culturels. Cette diversité génère naturellement des approches économiques variées. Les réalités diffèrent considérablement entre un lieu culturel au Brésil et son équivalent à Londres, notamment concernant le mécénat ou simplement la politique tarifaire.

Au sein de notre réseau, en collaboration avec nos collègues de Stéréopsia à Bruxelles, nous fédérons environ 80 festivals européens proposant de l'AR Réalité augmentée /XR sous différentes formes. Malgré nos tailles et territoires d’implantation variés, une rencontre a eu lieu en décembre 2024. Un constat frappant est apparu : sur les 26 festivals représentés, seuls les événements français pratiquent la gratuité pour le grand public, alors qu’en Angleterre, les spectateurs acceptent de payer jusqu’à 25 euros pour découvrir des œuvres immersives.

Cette diversité de modèles économiques que nous observons en tant que festival se retrouve également dans les structures qui participent à NewImages Festival. La richesse de ces rencontres réside précisément dans le partage d’expériences entre ces différents acteurs. L’écosystème AR/XR coréen présente des spécificités qui le distinguent de son homologue français, polonais ou canadien. L’ère numérique a décloisonné notre monde, rendant ces échanges et l’existence d’un lieu dédié à ces rencontres plus essentiels que jamais.

Où se situe le festival parmi ces 80 événements européens du secteur ?

Il y a deux aspects à considérer. Concernant le grand public, je ne dispose pas nécessairement des chiffres précis, car il est difficile de déterminer l’audience spécifique quand une section XR s’intègre dans un festival plus global. Mais pour la partie professionnelle, nous sommes aujourd’hui le plus grand marché au monde entièrement dédié à ce domaine. Les autres événements sont toujours associés à un festival ou un marché de film, d’animation, ou bien ce sont des manifestations autour de l’art numérique. Dans notre volet développement, les autres événements accompagnent entre 10 et 15 œuvres en moyenne, et j’ai une équipe permanente qui accompagne une cinquantaine de projets par édition.

Est-ce que cela intéresse les professionnels de voir le grand public interagir avec leurs œuvres ?

C’est précisément ce qui est intéressant. Toutefois, tous les créateurs ne saisissent pas cette opportunité. Certains restent auprès de leurs œuvres pendant les cinq jours, prennent beaucoup de plaisir à cette interaction et se déplacent spécifiquement parce qu’ils ont vraiment besoin de ces retours. D’autres n’exploitent pas du tout cette possibilité. Mais c’est aussi un travail que nous menons tout au long de l’année, avec des résidences d’artistes. Le problème, c’est qu’une fois l’œuvre terminée, les créateurs ne pourront pas nécessairement y revenir. Ils n’auront pas forcément les moyens financiers pour modifier certains aspects.

Est-ce que le budget de la manifestation a changé au fil des éditions ?

Nous sommes en plein dedans, notamment en tant que structure rattachée au Forum des images. Oui, le budget, même sans la crise actuelle, a changé parce que le festival a été initialement conçu comme un événement audiovisuel avec des chaises tournantes et des casques. Or, le secteur a évolué : il nécessite désormais de nombreux ordinateurs, de multiples casques et surtout beaucoup d’espace, en termes de mètres carrés.

L’enceinte du Forum des images ne suffit plus, et monter des tentes sous la Canopée du Forum des Halles n’est pas idéal. Parallèlement, il y a aussi la question de la rémunération des artistes, notamment pour la partie Hors Compétition.

Comment pouvons-nous mutualiser les coûts ?  »

Ce ne sont pas les mêmes dispositifs ni les mêmes tarifs que pour la projection d’une copie de film. Nous attendons encore le retour de certains partenaires financiers, notamment sur le volet grand public.

C’est là où je parle sincèrement de solidarité : comment pouvons-nous mutualiser les coûts ? Cette réflexion représente une opportunité pour les lieux culturels. Par exemple, pour les musées, venir à un festival comme le nôtre et rencontrer leurs homologues venus de l’autre bout du monde peut réduire les frais de production. C’est à la fois plus écoresponsable et cela peut apporter des solutions concrètes.

Est-ce que la question de la gratuité s’est posée ?

Bien sûr. C’est justement là où les aides publiques sont cruciales. Pour l’instant, je reste sur cette possibilité de gratuité, pour permettre à différents types de public de venir. Mais effectivement, tout est remis en question chaque année. Nous expérimentons aussi des tarifications à 4 euros pour un spectacle et une séance VR collective en salle de cinéma au Forum des images. On essaie de décrocher des sponsors, parce qu’il y a une visibilité importante ici.

Du 9 avril 2025 au 13 avril 2025 de 08:00 à 18:00
Forum des Images

Forum des images

• Institution culturelle parisienne ayant pour vocation de « constituer la mémoire audiovisuelle de Paris »

• Création  : 1988

• Mission : célébrer le cinéma et l’image animée sous toutes ses formes (fictions, documentaires, animation, longs et courts métrages, séries télévisées, films sur ordinateurs, etc)

Organisation de cycles de projection, de festivals, programmation jeune public, débats, masterclass, cours de cinéma…

• Propose une école de la création numérique pour les 12-18 ans, TUMO Paris. Programme pédagogique extrascolaire gratuit autour de 8 spécialités de technologies créatives (cinéma, animation, jeu vidéo, modélisation 3D, graphisme, dessin, programmation et musique)

Président : Marc Tessier
• Directeur général : Claude Farge
• Directeur des programmes : Fabien Gaffez

Contact : Diana-Odile Lestage, responsable du service de presse
• Tél. : 01 44 76 63 07


Catégorie : Salle


Adresse du siège

Westfield FORUM DES HALLES
2 rue du Cinéma
75001 Paris France


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Fiche n° 6117, créée le 05/12/2017 à 18:25 - MàJ le 13/03/2025 à 15:19


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