« Un projet sans frontières de la danse, de la création et des genres » (Mehdi Kerkouche, CCN Créteil)
« Succéder à Mourad Merzouki
Conseiller artistique @ Pôle en Scènes - Centre Chorégraphik Pôle Pik • Fondateur @ Compagnie Käfig
• Parmi ses créations :
- Vertikal (2018)
- Folia (2018)
- Danser Casa (co-créée avec Kader…
n’a pas été une tâche facile, notamment sur le plan économique. Son modèle est très différent du mien, puisqu’il est l’un des plus gros tourneurs en France, à l’échelle des CCN
Centre chorégraphique national
. Le départ d’un directeur qui assurait plus de 150 dates par an a évidemment un impact financier significatif. Il a fallu trouver un équilibre différent », indique Mehdi Kerkouche
Directeur @ Centre chorégraphique national de Créteil et du Val-de-Marne (CCN Créteil)
• Danseur et chorégraphe• Créations :- Portrait (2023)- Et si (pièce créée en 2020 pour des danseurs de l’Opéra…
, directeur du Centre chorégraphique national de Créteil et du Val-de-Marne, dans un entretien à News Tank le 19/04/2024. « Le CCN fonctionnait selon un équilibre composé à 70 % d’autofinancements et 30 % de subventions publiques. Depuis mon arrivée, nous sommes arrivés à un équilibre parfait : 50 %, 50 %. C’était là une volonté de ma part, envoyant le signal d’un label en forme, capable de créer et de faire des choses grâce à son attractivité », ajoute le danseur et chorégraphe qui a pris la tête du CCN le 01/01/2023.
« Nous avons fait des choix radicaux concernant nos conditions d’accueil studio. Nous accompagnons moins de compagnies à l’année, mais nous leur apportons plus de temps et de moyens. Les résidences durent désormais 2 à 3 semaines. Nous avons augmenté les ressources allouées, avec des coproductions allant de 5 000 à 12 000 euros. Notre objectif est de les doter d’un maximum d’outils pour favoriser la diffusion de leurs spectacles », déclare-t-il.
« Par ailleurs, nous avons élargi l’éventail des formes et des esthétiques soutenues par le CCN. Mon ambition, c’est un projet sans frontières de la danse, de la création et des genres. Nous avons ouvert nos portes à d’autres formes artistiques, telles que le seul en scène engagé et queer
relatif à la communauté LGBT+
d’Ève Magot, la compagnie Les Josianes qui mêlent cirque et danse contemporaine, ou encore Mellina Boubetra qui explore les frontières de la performance et de l’exposition dans son projet d’installation chorégraphique. »
Modèle économique, accompagnement des compagnies, ambitions pour le festival « On danse chez vous », nouveau bâtiment pour le CCN, projet de studio numérique, représentation des cultures chorégraphiques dans les directions des CCN, « visites sportives » organisées au Louvre, Mehdi Kerkouche répond aux questions de News Tank.
Le 24/04/2024 aura lieu la première de votre projet « Courez au Louvre », présenté au Musée du Louvre • Ancien palais des rois• Création en 1793 • Fréquentation 2023 : 8,9 millions de visiteurs (+14 %)• Fréquentation 2022 : 7,8 millions de visiteurs• Fréquentation 2021 : 2,8 millions de visiteurs… jusqu’au 31/05/2024. En quoi consiste ce projet de visites sportives ?
« Courez au Louvre » est une invitation du musée, à l’occasion des JOP Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 mais aussi de son exposition « L’Olympisme. Une invention moderne, un héritage antique », sur le thème de l’olympisme et de son héritage antique, qui ouvrira en parallèle à notre évènement. Le billet de cette expérience permet d’ailleurs de visiter, le même jour, cette exposition et le musée. J’ai imaginé un évènement participatif, créant une véritable rencontre entre la danse et le sport.
Il prend la forme d’un parcours à travers les espaces intérieurs du musée, avant l’ouverture des salles au public, proposant diverses activités et ateliers animés par des coachs spécialisés aux participants. Notre équipe comprend une diversité de profils, tels qu’une professeure de yoga, un coach spécialisé dans le cardio, un autre dans les ambiances funk et disco et une professeure de dancehall. En tout, quatre coachs et deux capitaines seront présents pour guider les participants dans leur exploration.
L’objectif est d’encourager une participation active : il n’y a pas de passivité dans la démarche des participants. Ils vont faire ce qu’on appelle un morning workout, ils doivent donc être en bonne condition physique pour vivre l’expérience à fond. Nous avons également prévu un parcours adapté aux personnes à mobilité réduite ou dont la mobilité est réduite par des traitements médicaux, comme des chimiothérapies. Mon objectif est de réussir à toucher un maximum de monde et que la danse soit accessible à tous.
Travailler avec le Louvre nécessite une logistique et une approche technique différentes de celles dont nous avons l’habitude »Nous travaillons sur ce projet depuis maintenant un an. Chaque rencontre, chaque rendez-vous avec les équipes du Louvre nous confirme leur volonté et leur plaisir sincère de nous accueillir. Travailler avec eux représente un défi stimulant. En effet, cela nécessite une logistique et une approche technique différentes de celles dont nous avons l’habitude. Les rencontres avec les conservateurs et les personnels du musée nous nourrissent au quotidien, nous permettant de mieux comprendre l’identité et l’histoire des lieux que nous investissons. Nous n’installons pas un Basic Fit au Louvre : chaque geste, chaque élément du projet a été construit par ce que le musée nous inspire.
Vous avez pris la tête du CCN Centre chorégraphique national de Créteil et du Val-de-Marne le 01/01/2023, sans avoir précédemment effectué de mandat dans un CCN. Qu’est-ce qui vous a amené à postuler à sa direction ?
En tant que directeur d’une compagnie indépendante, il me paraissait évident qu’il y avait un réel besoin d’ancrage. La perspective de pouvoir bénéficier des ressources et des outils d’un CCN constituait une première motivation. J’ai réalisé qu’en tant que directeur de la compagnie EMKA, je mettais déjà en place au quotidien le cahier des charges d’un CCN, avec des moyens évidemment bien plus modestes. Contribuer à la valorisation du secteur chorégraphique est une cause qui me tient à cœur, et j’ai déjà entrepris des actions en ce sens avec mes propres moyens, comme mon festival « On danse chez vous ». Je me sentais prêt.
De plus, je suis un enfant du territoire. Il m’a donc semblé logique de présenter ma candidature au CCN de Créteil, d’autant plus qu’il s’agit du seul à être implanté en Île-de-France. Cette proximité avec Paris m’offre la possibilité de continuer à répondre à des commandes et à des opportunités tout en maintenant un ancrage territorial solide, en développant mon projet de compagnie et toutes les activités culturelles associées. Rejoindre ce CCN correspondait donc parfaitement à ma volonté de rester actif et engagé.
Quels défis avez-vous dû relever ? Après un an à sa direction, votre regard ou vos objectifs ont-ils changé ?
Aucun chorégraphe n’est formé à la direction d’un CCN, s’il n’a pas déjà eu de poste de direction dans un de ces lieux auparavant. En nous choisissant, les tutelles misent sur un talent, une ambition, un projet. En ce qui me concerne, ma nomination a un peu été le pari de l’émergence. Il faut maintenant faire preuve de confiance envers le nouveau directeur et accepter sa manière de travailler. Il est normal qu’un temps d’adaptation soit nécessaire pour que chacun s’apprivoise. Il y a tout un aspect politique, financier, de politique culturelle dont on prend acte et corps au fur et à mesure. Entre mon arrivée et aujourd’hui, je ne fais plus le même métier.
Ma nomination a un peu été le pari de l’émergence »Ce qui est très difficile pour les chorégraphes, et ce dont j’ai pris conscience depuis mon arrivée, c’est que notre première envie, en arrivant dans un lieu tel qu’un CCN, est un projet artistique et culturel. Nous nous demandons d’abord comment développer l’art chorégraphique, notre matière et nos exigences au niveau du label. À côté de tout ça, il y a aussi les missions de projets culturels : l’implantation sur le territoire, l’accompagnement de l’émergence…
À mon arrivée, il m’a paru crucial d’évaluer la situation du CCN, notamment ses ressources, ses équipes et ses besoins. Mon objectif n’était pas de tout changer du jour au lendemain ou de faire table rase, mais plutôt de réfléchir à la manière de conserver ce qui fonctionnait tout en introduisant ma patte. Par exemple, Mourad Merzouki avait su tisser des liens solides avec le territoire.
Ma prise de poste a été particulièrement intense puisqu’elle a coïncidé avec la première de ma création « Portrait », le 06/01/2023. Nous avons dû composer avec une équipe réduite, avec 12 ETP en 2022 puis 5 en 2023, avant d’atteindre un état de marche au début de l’année 2024, avec huit personnes. Cette transition a nécessité des ajustements. Nous avons dû prioriser certains projets, comme l’accueil des compagnies. La chance que j’ai eue, c’est d’avoir créé mon spectacle « Portrait » avant d’arriver, ce qui m’a permis de me concentrer sur le projet pour le lieu et la direction. Cela va changer dès 2024, puisque je repars en création. C’est ce qui m’a manqué le plus l’année dernière.
Sur quel modèle économique repose votre institution ?
Succéder à Mourad Merzouki n’a pas été une tâche facile, notamment sur le plan économique. Son modèle est très différent du mien, puisqu’il est l’un des plus gros tourneurs en France, à l’échelle des CCN. Le départ d’un directeur qui assurait plus de 150 dates par an a évidemment un impact financier significatif. Il a fallu trouver un équilibre différent. Sous Mourad Merzouki, le CCN fonctionnait selon un équilibre composé à 70 % d’autofinancements et 30 % de subventions publiques.
J’ai la chance que, depuis mon arrivée, aucun de nos partenaires n’a réduit sa subvention, que ce soit l’État, la Ville de Créteil ou le Département du Val-de-Marne. Tous maintiennent leur soutien, ce qui n’est pas le cas pour toutes les structures culturelles, y compris dans notre région. En 2024, notre budget s’élève à près de 1,9 million d’euros.
Nous redirigeons ces ressources supplémentaires vers les actions culturelles, que nous pouvons ainsi autofinancer »L’une de nos ressources principales est la tournée de mon spectacle « Portrait », qui effectue une centaine de dates cette saison. Mon travail comprend aussi une part d’évènementiel, avec des commandes pour le public comme pour le privé qui varient d’une année à l’autre. Ces ressources nous permettent de dégager de la marge pour notre budget annuel. Nous avons décidé de les rediriger principalement vers les actions culturelles, que nous pouvons ainsi autofinancer. Nous sommes arrivés à un équilibre parfait : 50 % de financements publics, 50 % d’autofinancements. Nous en sommes très fiers : c’était là une volonté de ma part, envoyant le signal d’un label en forme, capable de créer et de faire des choses grâce à son attractivité.
Le site du CCN de Créteil et du Val-de-Marne va-t-il connaître des changements, tels que des travaux de rénovation ou d’extension ?
Il est impératif de construire un nouveau bâtiment pour le CCN de Créteil et du Val-de-Marne. Le site existe depuis 40 ans et il ne répond plus aux problématiques d’un CCN. Cette situation est commune à de nombreux CCN aujourd’hui : beaucoup de studios ne sont pas adaptés aux défis que nous rencontrons quotidiennement. Il est même remarquable que nous parvenions à mettre en place tout ce que nous sommes en train de réaliser avec nos installations actuelles. Nous disposons d’un seul studio pour l’ensemble de nos projets, alors que nous devrions en avoir au moins deux : un pour les compagnies en résidence et les actions culturelles et un pour les projets chorégraphiques que je porte.
Le site ne répond plus aux problématiques d’un CCN »Dès mon arrivée, j’ai réussi à mobiliser l’État qui s’est également impliqué en envoyant un architecte témoin de la DRAC Direction régionale des affaires culturelles pour évaluer la situation. Des travaux ne seraient pas suffisants, comme l’a révélé l’état des lieux. Nous avons besoin d’un nouveau lieu. Nous sommes en recherche de financements et en discussion avec nos partenaires pour garantir la pérennité du CCN et du label sur le territoire. C’est un projet d’envergure, mais je considère que j’ai de la chance d’arriver à ce moment précis. Je suis passionné par ces défis.
Vous avez annoncé vouloir « proposer un meilleur accompagnement des compagnies ». Comment cela s’est-il traduit ?
Nous avons fait des choix complètement radicaux par rapport à l’ancienne direction concernant nos conditions d’accueil studio. Ces décisions ont été influencées par mon expérience en tant que chorégraphe et directeur de compagnie indépendante qui a été accueilli par ce CCN, quand il était encore dirigé par Mourad Merzouki. J’ai pu identifier ce qui m’avait plu ou, à l’inverse, frustré.
Nous accompagnons moins de compagnies à l’année, mais nous leur apportons plus de temps et de moyens. Les résidences durent désormais 2 à 3 semaines. Nous avons augmenté les ressources allouées, avec des coproductions allant de 5 000 à 12 000 euros. Notre objectif est de les doter d’un maximum d’outils pour favoriser la diffusion de leurs spectacles. Nous avons mis en place un accompagnement personnalisé, comprenant deux volets :
- Un kit de communication, offrant la possibilité à chaque compagnie d’accueillir un photographe et un vidéaste lors de sa résidence ou après, afin de disposer d’images exploitables pour sa communication et la recherche de diffuseurs.
- Un partenariat avec la Fabrique de la danse Incubateur artistique spécialisé dans la danse, développant des programmes pédagogiques à destination de chorégraphes ou danseurs et danseuses• Création en 2015 • Inscription au RNCP de la formation… , proposant deux formations pour chaque compagnie, permettant aux membres de leur équipe de renforcer leurs compétences en fonction de leurs besoins spécifiques.
Par ailleurs, nous avons élargi l’éventail des formes et des esthétiques soutenues par le CCN. Mon ambition, c’est un projet sans frontières de la danse, de la création et des genres, ouvert à tous et à toutes les formes d’esthétiques. Nous avons ainsi ouvert nos portes à d’autres formes artistiques, telles que le seul en scène engagé et queer d’Ève Magot, la compagnie Les Josianes qui mêlent cirque et danse contemporaine, ou encore Mellina Boubetra qui explore les frontières de la performance et de l’exposition dans son projet d’installation chorégraphique.
Nous sommes passés d’une centaine de candidatures avant mon arrivée à plus de 250 en 2023. Cette augmentation ne s’explique pas uniquement par mon arrivée, même si cette politique d’ouverture a certainement incité des artistes qui n’étaient pas auparavant accompagnés par le CCN à postuler, mais aussi par un véritable besoin sur le territoire. Nous nous trouvons à un moment où la danse a besoin d’accompagnement et où les compagnies multiplient les partenaires pour se financer.
Les neuf compagnies accompagnées par le CCN en 2024
- Ève Magot (La Fronde)
- Laura Lamy, Tristan Robillard (Resodancer Company)
- Marion Motin (Collectif Les Autres)
- Théophile Bensusan (Benthé)
- Mathieu Bord, Sami Blond (Ino)
- Antonin Rioche (Funny People)
- Julia Spiesser (Les Josianes)
- Mellina Boubetra (Etra)
- Anatole Hossenlopp (Hoda)
Vous avez créé le festival « On danse chez vous » en 2020, dont les deux dernières éditions ont été accueillies à Chaillot — Théâtre national de la Danse • La grande salle du Théâtre de Chaillot est inaugurée le 24/02/1939 (c’est dans cette salle qu’est signée la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme le 10/12/1948).• Reconnu « théâtre… en 2022 et 2023. Quelles sont vos ambitions pour ce festival ?
Lors de son édition 2023, les 16 et 17/09/2023, le festival a rassemblé plus de 200 artistes et 6 500 spectateurs à Chaillot. Il faut se rappeler qu’il est né dans ma chambre, sans rien sinon un téléphone. L’essence de « On danse chez vous » réside dans sa capacité à créer des connexions entre des approches très populaires et ouvertes, tout en élargissant l’intérêt du public pour une variété d’autres formes et disciplines. Ce projet, sans frontière et sans limites, répond et résonne avec la vision de Rachid Ouramdane
Directeur @ Chaillot - Théâtre national de la Danse
• Danseur et chorégraphe.
• Diplômé du CNDC (Angers) en 1992.
• Parmi ses créations :
- Corps extrêmes (2021)- Eden (2020)- Variation(s…
pour Chaillot. Le théâtre a d’ailleurs fait preuve d’une confiance totale dans la mise en place de l’évènement, sans que rien ne nous soit interdit. Au contraire, nous avons été encouragés à imaginer une variété d’activités allant des moments très festifs, comme le battle de lip sync et la roller-party, jusqu’à des initiatives plus « niches ».
Nous avons proposé des initiations à des danses comme le flamenco ou le classique, mais aussi des zones d’exposition où nous avons pu diffuser des œuvres de danse, grâce à nos partenariats. Il s’agissait par exemple de captations, de documentaires, de créations chorégraphiques originales, de courts métrages… Une dimension étroitement liée à mon projet de studio de création numérique pour le CCN.
Pour les années à venir, nous envisageons de poursuivre le développement du festival selon le même modèle ouvert, participatif et contemplatif. Chaillot a déjà exprimé sa volonté de continuer à nous accueillir, et nous avons déjà confirmé une édition chez eux en 2025. Nous sommes encore en train d’échanger pour les éditions à venir. Parallèlement, nous explorons des possibilités pour faire exister le festival dans d’autres lieux et territoires, afin de mettre en lumière d’autres artistes et régions.
Nous bénéficions du soutien de partenaires historiques, tels que France Télévisions • Groupe audiovisuel constitué des chaînes : - France 2 - France 3 - France 4 (chaîne de la jeunesse, de la famille, de la culture et notamment du spectacle vivant) - France 5 - France TV Slash… , qui nous accompagnent depuis le début et ont déjà confirmé leur engagement pour les prochaines éditions. Le festival fait ainsi l’objet de captations, comme en 2023 où les battles de danse ont été diffusées en direct sur France TV Culturebox et leurs réseaux sociaux, ou d’émissions spéciales comme le « best-of », film chorégraphique qui retrace tout l’évènement.
En quoi consiste votre projet de studio de création numérique ?
Le studio numérique a été un élément essentiel de mon projet dès le départ, et il figurait dans mon dossier de candidature. En 2023, nous avons entamé des discussions avec des partenaires, principalement axées sur des projets audiovisuels. Cependant, notre ambition va bien au-delà de cela. Nous réfléchissons notamment à ce qu’implique la captation d’un spectacle : je ne pense pas que la rencontre entre un réalisateur et un chorégraphe, qui a posé des enjeux, une intention, une vision des choses, puisse être simplement captée par des caméras installées aux quatre coins d’une salle.
Un CCN, et plus largement un label national, doit s’intéresser aux questions numériques »Mon ambition est de mettre en place un accueil studio qui accompagne non seulement les chorégraphes émergents sur le plateau, mais aussi les projets de développement audiovisuel et numérique. Cependant, cela pose des défis techniques et soulève des questions concernant le public et les partenaires. Les artistes se sont déjà emparés de ces sujets depuis longtemps, mais pas les labels nationaux, ce qui est d’ailleurs étonnant. Des initiatives telles que les courts métrages chorégraphiques ou les expérimentations autour de l’intelligence artificielle et de la réalité virtuelle, comme celles menées par Blanca Li, sont riches. Il me semble évident qu’un CCN, et plus largement un label national, doit s’intéresser à ces questions.
Quel sera le modèle économique de ce studio ? Comment va-t-il insérer dans vos activités et partenariats actuels ?
En 2024, nous avons commencé à rédiger un cahier des charges pour le futur studio numérique. Pour cela, nous nous sommes entourés d’une directrice de production issue du secteur audiovisuel et d’un opérateur, qui apporte son expertise technique. Nous examinons tous les aspects sur lesquels un CCN doit se pencher pour fournir les meilleurs outils aux chorégraphes, ainsi que pour encourager de véritables collaborations entre chorégraphes, réalisateurs et scientifiques dans le développement de projets numériques.
En 2024, nous jetons véritablement les bases de ce projet, en réfléchissant à sa faisabilité et à son modèle économique. Cela pourrait se concrétiser par des demandes de subventions supplémentaires ou par des partenariats avec des acteurs publics ou privés. La réalisation du studio se concrétisera dans les années à venir. Il est probable que nous ne soyons en mesure de répondre qu’à certaines questions dans un premier temps. Nous espérons faire progresser et évoluer le projet au fil du temps.
Vous mentionnez de nombreux artistes « engagés » et de projets « militants » dans votre programmation et vos résidences. Est-ce une volonté assumée de votre part ?
C’est évident. Nous sommes d’abord des artistes. Dans mon spectacle « Portrait », qui ne semble pas être une œuvre politique à première vue, je présente tout de même un parti pris évident : celui de donner de la visibilité à des artistes âgés de 19 à 67 ans, chacun avec des physiques et des identités chorégraphiques différentes. Ce spectacle revendique le fait que des personnes aux profils divers peuvent défendre un projet commun. Je traite ce sujet avec ma propre esthétique, mon désir de rassembler, car c’est ma manière d’aborder ce thème.
Pour continuer à faire évoluer la danse, mais aussi pour ne pas tuer les labels, il est crucial de garantir cette ouverture »Nous sommes confrontés à un avenir compliqué pour le secteur culturel dans son ensemble. Je suis convaincu que nous pourrons surmonter ces difficultés si nous montrons que notre présence est indispensable. Cela passe par la valorisation de toutes les formes artistiques, de tous les sujets possibles, en donnant de la visibilité aux différents discours. La danse ne se nourrit que de cette ouverture. Pour continuer à faire évoluer la danse, mais aussi pour ne pas tuer les labels, il est crucial de la garantir.
En tant que directeur d’un CCN, mon rôle est d’accompagner les paroles et les visions des chorégraphes. C’est mon devoir de donner de la visibilité aux artistes qui en ont besoin. Nous n’avons en aucun cas le droit de rejeter une expression artistique au motif qu’elle serait politique. Au contraire ! L’art est politique, la danse est politique, les artistes sont politiques. Il revient ensuite à chacun d’apprécier comment développer ces aspects sur scène. Dans les années à venir, le CCN de Créteil et du Val-de-Marne continuera à ouvrir ses portes, non seulement à travers ses programmes d’accueil en studio ou d’artistes associés, mais au-delà.
La ministre de la Culture, Rachida Dati
Ministre @ Ministère de la Culture • Conseillère @ Ville de Paris • Maire du 7e arrondissement @ Ville de Paris
, a annoncé « vouloir doubler le nombre de chorégraphes de hip-hop à la direction des 19 CCN pour le porter à six d’ici 2026 », le 31/03/2024. Que pensez-vous de cette déclaration ?
Je trouve formidable de voir émerger une prise de parole en soutien à une communauté en pleine effervescence. J’attends désormais des actions. En analysant la situation actuelle des CCN, après les départs de Mourad Merzouki et de Kader Attou
Fondateur @ Pôle méditerranéen de création chorégraphique • Cofondateur @ Compagnie Accrorap
• Principales créations :
- Triple Bill (2018)
- Allegria (2017)
- Un break à Mozart 1.1…
, il est indéniable qu’un besoin se fait sentir.
Au-delà des cultures hip-hop, les CCN ne représentent pas la diversité des cultures chorégraphiques dans leurs directions. Il est impératif de diversifier en allant vers d’autres esthétiques. Ces enjeux vont traverser les renouvellements à venir dans le label. Lorsque j’ai pris mes fonctions en tant que directeur, j’ai souhaité élargir considérablement le champ de notre programmation et de nos activités. C’était à la fois un besoin et un désir profond.
Je ne suis cependant pas d’accord avec son affirmation selon laquelle il y aurait trois CCN dédiés au hip-hop : le CCN de Rennes, avec le collectif FAIR-E, me semble être le seul véritablement dédié aux cultures hip-hop. Parmi les 19 CCN existants, c’est trop peu. Pour ma part, je n’ai jamais revendiqué le titre de chorégraphe de hip-hop. Le simple fait que des danseurs de hip-hop soient présents sur le plateau de mes spectacles, comme dans « Portrait », ne transforme pas ces œuvres en pièces de hip-hop, mais les inscrit plutôt dans le cadre de la danse contemporaine.
Mehdi Kerkouche
Directeur @ Centre chorégraphique national de Créteil et du Val-de-Marne (CCN Créteil)
• Danseur et chorégraphe
• Créations :
- Portrait (2023)
- Et si (pièce créée en 2020 pour des danseurs de l’Opéra national de Paris)
- Dabkeh (2020)
- Mute (solo, 2018)
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Parcours
Fondateur
Fondateur et directeur
Fiche n° 46023, créée le 11/05/2022 à 16:08 - MàJ le 18/04/2024 à 17:26
Centre chorégraphique national de Créteil et du Val-de-Marne (CCN Créteil)
• Créé en 1985.
- Organise le festival « On danse chez vous » (initié en 2020 par Mehdi Kerkouche)
• Directions successives :
- Maguy Marin (1985-1998)
- José Montalvo et Dominique Hervieu (1998-2009)
- Mourad Merzouki (2009-2022)
• Directeur : Mehdi Kerkouche (depuis le 01/01/2023)
• Contact : Victoria Thao-Lieu, assistante de direction
• Tél. : 01 56 71 13 20
Catégorie : Salle
Adresse du siège
Maison des arts et de la culture1 Place Salvador Allende
94000 Créteil France
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Fiche n° 1735, créée le 18/04/2014 à 02:38 - MàJ le 05/08/2024 à 14:25
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