Art contemporain : deux tribunes d’artistes et professionnels contre leur précarisation
Un collectif de 63 artistes, curateurs et historiens de l’art, dénonce un retard de neuf mois dans le paiement de leur prestation dans différentes écoles supérieures d’art relevant de la tutelle du ministère de la Culture en juin 2019, dans une tribune publiée par Libération le 04/02/2020. « Pourquoi des honoraires si bas [600 € brut, Ndlr.] pour des gens déjà dans le besoin, pourquoi un paiement des mois après nous empêchant de cotiser pour la retraite, pourquoi l’État lui-même agit-il de la sorte avec des gens qui n’ont déjà aucun statut, pourquoi précariser les plus précaires ? […] Nous avons donc décidé communément de refuser toute participation à des jurys pour l’année 2020. […] Car, à donner si peu de valeur aux diplômes, à celles et ceux qui y travaillent, vous dédaignez aussi les étudiants et les écoles qui les forment », déclarent les signataires.
Par ailleurs, un groupe de jeunes artistes, participant à la 69e exposition annuelle de Jeune Création à Komunuma/Fondation Fiminco à Romainville (Seine-Saint-Denis), a déployé, avec Art en grève Paris, une banderole portant l’inscription « FIMINCO + JEUNE CRÉATION, PRÉCARITÉ + GENTRIFICATION », lors de l’inauguration le 25/01/2020. « Jeune Création valide des fonctionnements qui entretiennent la précarité [des artistes] tout en les mettant en compétition. […] Nous travaillons à perte, avec la visibilité pour seule rémunération », ont-ils déclaré. « Nous offrons une rémunération de 150 €, mais aussi une visibilité, un espace, des moyens techniques. Pour les expositions “curatées”, le budget est de 1 500 € par artiste (production incluse), et chacun aura accès aux plateaux de production de la Fondation Fiminco », s’est défendu Jérémy Chabaud, directeur de Jeune Création, dans Le Quotidien de l’art. La 69e édition de Jeune Création a rassemblé 57 artistes (31 femmes et 26 hommes), retenus parmi les 1 440 dossiers de candidatures reçues, du 26/01 au 02/02/2020.
À la suite de cette action, deux artistes ont retiré leurs œuvres de l’exposition « A Spoonfull of Sugar », qui se tient à Jeune Création du 01/02 au 07/03/2020, et s’en expliquent dans un texte, de manière anonyme. « Il nous semble impossible de travailler au sein d’un contexte tel que le site Komunuma. Le projet de gentrification de Romainville entrepris par le groupe Fiminco s’inscrit de plain-pied dans une logique capitaliste de gestion de nos espaces publics par des acteurs privés, ayant pour effet d’accentuer la ségrégation sociale et d’éliminer les corps politiques les plus vulnérables. […] En refusant de nous adapter aux conditions de travail qui nous sont proposées aujourd’hui, nous espérons participer à l’espace de parole et de solidarité qui a été ouvert au cours des dernières semaines en lien avec le mouvement Art en grève, et rompre avec des institutions qui entretiennent le silence sur notre précarité », déclarent-ils.
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